La Commission spéciale sur les impacts des écrans et des réseaux sociaux sur la santé et le développement des jeunes a terminé sa tournée des écoles à Châteauguay le 22 novembre. En visite au Collège Héritage, la Commission voulait entendre les étudiants sur leur vision des écrans, alors qu’ils sont complètement interdits pendant les heures d’école.

C’est la députée de Châteauguay Marie-Belle Gendron qui a proposé à la Commission de visiter cette école de sa circonscription. Mme Gendron fait partie des 12 élus qui forment cette commission transpartisane.

Depuis l’automne, ils ont entendu une foule de points de vue sur la question des écrans et des réseaux sociaux chez les jeunes. «Les opinions varient, c’est incroyable, mentionne Marie-Belle Gendron en entrevue. Des groupes nous disent : c’est parfait, on utilise des tablettes à la journée longue à l’école et ça se passe super bien. D’autres spécialistes nous disent : pas de réseaux sociaux avant 21 ans!»

La Commission a été créée puisque l’utilisation des écrans chez les jeunes «devient un enjeu sociétal». Au terme des travaux, un rapport sera rédigé. «Les consultations nous donnent une bonne idée de ce qu’on peut faire. Est-ce qu’on peut légiférer? Est-ce qu’on va réglementer? On regarde aussi ce qui se fait ailleurs. Rien n’est exclu pour le moment», explique la députée.

Parlant de l’étranger, l’Australie a approuvé une loi le 28 novembre interdisant l’accès aux réseaux sociaux chez les moins de 16 ans, soit l’une des mesures les plus strictes au monde.

La tournée de 18 écoles primaires et secondaires à travers la province, a permis d’établir plusieurs constats par rapport à l’utilisation des écrans chez les jeunes.

«Il y a une addiction c’est sûr, dit d’entrée de jeu Marie-Belle Gendron. Les jeunes ont un cellulaire en moyenne entre 7 et 12 ans. Ils savent et se sentent mal d’avoir une utilisation trop importante des écrans.» D’ailleurs, les jeunes disent majoritairement être d’accord à ce qu’il y ait un meilleur encadrement, mais souvent ils font référence aux plus jeunes qu’eux.

Ils remarquent aussi que leurs parents ne sont guère mieux et qu’eux aussi passent trop de temps sur les écrans.

Fait intéressant, lorsque les membres de la commission questionnent les étudiants sur ce qu’ils choisissent entre une heure de temps d’écran versus une heure d’activité avec leur parent, la quasi-totalité d’entre eux optent pour l’activité avec le parent.

À l’unanimité, les jeunes ont confié avoir menti sur leur âge pour accéder aux réseaux sociaux s’ils n’ont pas l’âge minimum requis, et ce, avec l’accord des parents.

L’objectif n’est pas de démoniser l’utilisation des écrans. La députée rappelle que c’est la principale source d’information des jeunes, d’où l’importance de leur apprendre qu’il y a du bon contenu, du mauvais et du contenu dangereux sur le Web et de les accompagner dans cet univers virtuel.

L’exemple du Collège Héritage

Les cellulaires sont interdits dans les classes des écoles secondaires du Québec depuis janvier 2024. Le Collège Héritage à Châteauguay n’a pas attendu les directives provinciales pour implanter une telle mesure et l’a même élargie à la grandeur de l’école. Depuis septembre 2023, les élèves du Collège ne peuvent utiliser leur appareil de communication (tablette, cellulaire, montre intelligente) entre 9 h et 16 h, soit les heures d’école. L’appareil doit être rangé dans le sac à dos en tout temps, explique le directeur général Paul Côté. Si un cellulaire est confisqué, le parent doit venir le récupérer.

C’est en remarquant le comportement des étudiants entre les cours qu’une réflexion s’est amorcée pour le personnel de l’école. «On se promenait dans la cafétéria, et sans vouloir caricaturer qu’ils étaient tous penchés vers le cellulaire, mais on voyait, qu’au lieu de participer à une activité quelconque, ils étaient sur leur écran», explique-t-il.

La direction a fait un sondage auprès des parents qui ont appuyé majoritairement la démarche. «Le pari qu’on a fait, c’est de leur offrir autre chose à faire que d’être sur le cellulaire. On a donc proposé une offre bonifiée de parascolaire en espérant qu’ils socialisent plus et effectivement, depuis, les élèves participent plus», constate le directeur.

La transition s’est bien passée selon lui. «Évidemment, au début ça a créé un petit remous. Ils étaient habitués d’avoir leur cellulaire. C’est un peu comme pour n’importe quoi, le vapotage par exemple, il faut intervenir quand il y en a», mentionne M. Côté. Somme toute, il dit être «très content de la mesure et ne reviendrait pas en arrière».

La Commission spéciale sur les écrans poursuit son travail. D’ailleurs, les citoyens peuvent s’exprimer et participer à une consultation en ligne jusqu’au 31 janvier. Les mémoires déposés sont également accessibles sur le web.