chronique

Faut brancher grand-père (Texte publié en 2001)

le vendredi 17 avril 2020
Modifié à 7 h 40 min le 18 avril 2020
Par Michel Thibault

mthibault@gravitemedia.com

(En rappel : texte publié en février 2001) À l'hospice....(Pardon, il faut maintenant dire un CHSLD, pour centre hospitalier de soins de longue durée.) À l'hospice, donc le beau-père passait ses grandes journées à ruminer de sombres pensées dans sa chaise roulante. La plupart du temps seul avec quatre murs drabes, la télé éteinte et 80 ans de souvenirs. Ses heures s'écoulaient au compte-gouttes dans ce qui n'était plus que la salle d'attente de la mort. À lire aussi : Des vidéos, petits mots doux et appels pour réconforter les aînés Je me disais que je préférerais crever plutôt que de me retrouver en perte d'autonomie dans ce genre de prison sans barreaux avec vue imprenable sur le néant. Plus maintenant. Le jour où mes adorables petits-enfants vont décider de placer pépé, je vais accepter volontiers mais à une condition: qu'ils me branchent! Pas sur un poumon d'acier  ou un moniteur cardiaque! Sur Internet pardi! Même cloué dans un fauteuil roulant et cloîtré dans une chambre, avec Internet, je ne serais jamais tout seul. Mes chéris pourraient être en Chine et moi à Châteauguay et, grâce à une petite caméra qui ne coûte même pas 100$, je pourrais les voir et jaser avec eux tous les jours, sans que ça me coûte un rond. Je pourrais me faire battre aux échecs par les meilleurs joueurs du monde, visiter des musées, écouter des films, envoyer des cartes de Saint-Valentin animées ou encore collectionner les vieux succès des années 70. L'autre jour, avec le logiciel Napster bien connu, j'ai cherché, par curiosité, une pièce quétaine intitulée 'M. Le Robot',  d'un ancien groupe appelé Les Lutins qui sévissait dans mon enfance. Surprise!  La chanson y était. C'est vous dire tout ce qu'on peut trouver sur la toile. Des dizaines de logements pour personnes âgées sont en construction à Châteauguay, sans compter les  résidences et les centres d'accueil existants. Tous ces vieux devraient être abonnés à Internet que je prêchais récemment à qui voulait l'entendre. Certains étaient sceptiques. Bien les voilà confondus. Dans La Presse de l'autre mercredi, on lit que «les résidences pour personnes âgées devraient mettre des ordinateurs à la disposition de leurs pensionnaires et leur permettre d'avoir accès au réseau Internet, estime le Centre d'études appliquées de l'Université McGill». Le programme pilote mené auprès de résidants de 70 à 90 ans d'un centre d'accueil de Côte Saint-Luc a démontré que les nouvelles technologies de l'information peuvent contribuer à rehausser l'estime de soi des aînés et à améliorer leur santé, tant physique que mentale, selon l'article. L'activité préférée des pensionnaires: l'échange de courrier électronique avec leurs enfants et petits-enfants. La coordonnatrice de la recherche, citée dans le quotidien, déplore qu'on a trop souvent tendance à infantiliser les personnes âgées et à croire qu'elles sont incapables d'apprendre. Diantre, vieillir ne rend pas épais! On ne devient pas demeuré du simple fait de dépasser l'âge de la retraite. Avec de l'équipement adapté, des claviers munis de touches plus grosses, par exemple,  et quelqu'un qui lui enseigne les bases, n'importe quel octogénaire peut maîtriser la navigation dans le monde virtuel. Allez, confiez une souris à grand-père ça lui fera un domaine où il sera encore vert.... [caption id="attachment_79827" align="alignnone" width="3007"] Le texte a été "Lettre de la semaine" de l'édition du 25 février 2001 de La Presse.[/caption]