Actualités
Choix de la rédaction

Patiente orpheline : une consultation au privé à 230 $ pour un simple renouvellement 

le vendredi 13 septembre 2024
Modifié à 13 h 05 min le 13 septembre 2024
Par Yanick Michaud

ymichaud@gravitemedia.com

Dans le cas de la patiente rencontrée par Le Courrier, le pharmacien a refusé de renouveler le même médicament qu’elle prend pourtant depuis 2007.  (Photo : Pixabay)

Linda Paré est une patiente orpheline du système de santé public québécois et elle ne peut se résoudre à croire qu’elle a dû, pour la première fois de sa vie, payer au privé pour obtenir les services d’un médecin. 

«Je suis à Longueuil depuis quelques années, il y a 400 000 personnes ici, c’est la cinquième plus grande ville au Québec, ce n’est pas une petite ville de campagne. Mais je ne suis pas capable de me trouver un médecin de famille», explique la Longueuilloise de 64 ans qui habitait à Montréal jusqu’à il y a trois ans. 

Lors de son déménagement, elle s’est inscrite sur la liste des patients orphelins afin d’obtenir un nouveau médecin qui pourrait la suivre pour son anxiété anormalement élevée. « C’est un problème génétique, je vais en souffrir toute ma vie. C’est la raison pour laquelle j’ai besoin et je vais toujours avoir besoin des antidépresseurs que je prends depuis 2007 », explique la dame retraitée qui ne se considère ni très riche, ni très pauvre. 

Là où le bât blesse

Or, Linda Paré a bien tenté d’obtenir des rendez-vous pour renouveler son médicament. Mais il lui a été impossible depuis le printemps dernier d’obtenir de la disponibilité avec une médecin qui la voyait depuis peu. « Elle est absente pour une durée indéterminée et je n’avais pas été avisée. Je l’appelais, sans obtenir de réponses depuis des mois. J’ai décidé de me rendre sur place et ça là que j’ai appris ça. J’ai donc appelé au 811 pour expliquer que je devais obtenir un renouvellement pour le médicament que je prends depuis longtemps », explique-t-elle. 

L’agente du 811 lui mentionne qu’elle pourrait, sans garantie, obtenir un rendez-vous en août. «Nous étions en mai. J’étais dans de beaux draps. Mes options selon elle, étaient de faire appel au privé ou de me rendre à l’urgence. Mais je ne voulais pas aller à l’urgence. Ils disent de ne pas y aller si ce n’est pas une urgence. J’ai donc trouvé une clinique privée. Après une semaine et demie d’attente, j’ai rencontré un médecin pour 5 minutes. J’ai dû payer 230 $ pour un simple renouvellement», déplore la dame qui doit se rendre à pied à ses différents rendez-vous puisqu’elle ne possède pas de voiture. 

Recours limités des pharmaciens 

«Je répète, je ne suis pas riche, alors ce 230 $ pour moi, c’est véritablement beaucoup d’argent. J’aurais aimé qu’un pharmacien puisse me renouveler mon médicament en attendant que je puisse avoir un médecin. Mais puisque c’est une maladie mentale dont il est question, il ne peut renouveler pour plus de deux mois. C’est déplorable. Il manque de 1000 à 1500 médecins de famille au Québec, pourquoi ne pas donner plus de responsabilités à nos pharmaciens. Il voit dans mon dossier que je prends ça et que j’en ai besoin. Depuis 2007. Je ne peux comprendre», explique Linda Paré qui ajoute qu’ailleurs au Canada, les pharmaciens ont ce pouvoir. 

«Aussi, ailleurs au pays, les médecins sont obligés de faire des heures au public. Nous payons pour leurs études, ce devrait être normal de pouvoir bénéficier de leurs services. Le partage des responsabilités devrait se faire et ça règlerait une partie du problème», juge celle qui a été obligée d’arrêter de travailler il y a quelques années et qui souffre de problèmes de sommeil depuis. «J’ai hâte de trouver un médecin qui va pouvoir m’aider sans que ça ne me coûte trop cher. Je paye déjà assez pour le système», conclut-elle.

Prolongation

Interrogés sur la situation, les responsables du Ministère de la Santé et des Services sociaux ont souhaité répondre par courriel. 

«Un pharmacien peut prolonger une ordonnance afin que le traitement prescrit à un patient ne soit pas interrompu; la durée de prolongation d’une ordonnance ne peut excéder la durée de validité de l’ordonnance initiale ou, si cette durée est supérieure à un an, elle ne peut excéder un an. Il y a ainsi des limites en termes de durée de prolongation possible. Donc, la prolongation d’ordonnance est possible au Québec depuis de nombreuses années. Ce service est couvert de façon universelle et gratuite. Il s’agit d’une activité professionnelle que le pharmacien exerce selon son jugement (évaluation des risques et des bénéfices cliniques propre à la situation du patient). Le pharmacien juge s’il est opportun de prolonger ou non», a-t-on rédigé.