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Maison Moïse-Prégent : déconstruite et transformée en parc

Il y a 5 heures
Modifié à 11 h 10 min le 11 mars 2025
Par Valérie Lessard

vlessard@gravitemedia.com

La Maison Moïse-Prégent à Châteauguay. (Photo : Le Soleil - Archives)

La Ville de Châteauguay déconstruira cette année la Maison Moïse-Prégent, considérée comme une des premières construites à Châteauguay, sinon la première, dans le secteur du village entre la fin du 18e et le début du 19e siècle. Laissé à l’abandon depuis plus de 10 ans, le site de la maison sera transformé en parc municipal à vocation patrimoniale.

En janvier 2025, le conseil municipal a approuvé une modification du zonage pour inclure le lot, où se trouvent actuellement la maison et ses annexes, dans une zone de parc qui portera le nom Moïse-Prégent. Elle a pignon au 4, chemin de la Haute-Rivière, tout près de la rue Principale, du pont Arthur-Laberge et de la rivière Châteauguay.

«En intégrant un espace de mémoire dédié à la maison Moïse-Prégent, nous créons un pont entre le passé et le présent qui bénéficiera aux générations actuelles et futures», commente le maire Éric Allard.

Illustration conceptuelle du projet. (Photo : gracieuseté Ville de Châteauguay)

 La Ville optera pour une déconstruction avec veille patrimoniale plutôt qu’une démolition, afin de «récupérer et réutiliser les matériaux encore viables pour les intégrer au futur aménagement du parc». Ce travail sera d’ailleurs fait en collaboration avec la Société du musée du Grand Châteauguay, gestionnaire de la Maison LePailleur. «Cette démarche permet une analyse fine de l'état des matériaux et nous donne le temps nécessaire à la récupération durable et responsable de ceux-ci grâce au tri sélectif», explique Karine Landerman, directrice générale du musée de la Maison LePailleur.

L’exemple de l’espace Gravel

Une démarche similaire avait été faite en 2016 avec la Maison Gravel, voisine de la Maison LePailleur. Certains murs et éléments architecturaux ont été conservés et le site est désormais un lieu de détente et d’interprétation. La déconstruction avait mené à des découvertes intéressantes selon Mme Landerman, comme une pierre gravée de l'année de construction de la maison Gravel trouvée sous le revêtement extérieur qui est désormais mise en valeur dans l’espace Gravel. «Cela pourrait aussi arriver avec la Maison Moïse-Prégent. Nous verrons donc la nature des découvertes à venir, mais quelques éléments spécifiques aux bâtiments de cette époque seraient pourtant intéressants à reprendre dont, en effet la hauteur de la panne faîtière, les deux versants, les cheminées et la maçonnerie de moellons», souligne-t-elle.

Des fouilles archéologiques ont également été effectuées sur le site à l’automne 2024. Quelques artéfacts ont été trouvés. Le rapport de fouilles est toujours en préparation, selon la directrice du Musée. Le rapport préliminaire fait état d'objets provenant de différentes époques.

«On y retrouve des artéfacts domestiques datant de la fin du XVIIIe siècle comme des fragments de céramique et de terre cuite. Des objets du XIXe siècle ont également été identifiés tels qu’une fiole complète en verre et un bouton en os», indique Sarah-Maude Geneau, conseillère en communication à la Ville. Des objets plus récents comme des attaches à pain en plastique et deux pièces de 25 cents datant de 1973 et 1974 ont aussi été trouvés.

Un parc à plusieurs vocations

L’installation de panneaux d’interprétation historique et l’ajout de mobilier urbain et d’éclairage sont prévus dans le futur parc, ainsi que la création d’un parc éponge pour la gestion des eaux pluviales, la mise à niveau des terrains de pétanque et l’aménagement d’un accès supplémentaire à la rivière.

La Ville n’est pas en mesure de dire combien coûtera le projet pour le moment puisque celui-ci n’est pas encore défini, explique Isabelle Beyrouti, directrice des communications à la Ville. «Nous devons dans un premier temps déconstruire la maison, voir les matériaux encore sains avec lesquels nous pourrons réaménager, et ensuite nous procéderons à un véritable travail de plans et devis avec notre équipe du Génie», précise-t-elle. La Ville tentera d’obtenir des subventions pour ce projet.

Lors de la séance extraordinaire du 10 mars, le conseil municipal a autorisé l'utilisation d'une somme de 120 000 $ dans l'excédent non affecté pour la déconstruction de la maison.

La déconstruction de la maison est prévue pour 2025. Ensuite, les travaux d’aménagement s’échelonneront sur plusieurs années pour une finalisation estimée vers 2028-2029. Ils seront synchronisés avec les travaux de séparation des égouts pluvial et sanitaire prévus dans le plan quinquennal d’immobilisations 2025-2029.

Négligée depuis longtemps

La Ville avait acheté la maison en 2014 au coût de 285 000 $ puisqu’elle considérait le site stratégique pour redévelopper et mettre en valeur ce secteur historique. Des rapports d’inspection indiquaient déjà à l’époque un mauvais état des lieux. La situation s’est empirée au fil des ans. En 2018, le conseil municipal de l’époque voulait se départir de la maison, mais n’avait reçu aucune soumission lors de son appel d’offres. En juin de cette année-là, la cheminée a dû être démolie d’urgence puisqu’elle menaçait de s’écrouler.

Un drame

En 2022, une femme a péri dans l’incendie de la grange située sur le terrain de la Maison Moïse-Prégent. Elle était restée coincée dans la bâtisse qui avait été barricadée par des employés municipaux quelques heures avant le drame. Le coroner responsable d’investiguer sur son décès recommandait la démolition de cette propriété désaffectée.

Cette maison n’est pas classée par le ministère de la Culture et des Communications et n’est donc pas un bien patrimonial reconnu. Une analyse effectuée en 2021 par la Société du Musée du Grand Châteauguay concluait «qu’elle possède une importance certaine dans l’histoire de Châteauguay et de son village, autant comme vestige patrimonial que trésor national politique, entre autres lié aux Rébellions patriotes 1837-1838». C’est à la fin des années 1800 que la maison a été vendue à Moïse Prégent. Elle est restée dans la famille Prégent jusqu’à sa vente à la Ville en 2014.

L’analyse concluait également que le niveau d’authenticité de la maison Moïse-Prégent était «pauvre» en raison de nombreux changements et travaux effectués au fil des siècles.