Des commerçants de Châteauguay ont reçu une lettre du conseil de bande de Kahnawake la semaine dernière les informant du boycott à l’égard d’entreprises châteauguoises. Kahnawake demande aux commerçants de mettre de la pression sur les élus locaux pour régler le problème du transfert des terres.

Anne Fradette-Brunet, une des copropriétaires de la pâtisserie Obsession à Châteauguay,  fait partie des commerçants ayant reçu une lettre signée des mains du Grand chef de bande de Kahnawake, Joe Norton. Ces dernières années, la pâtisserie a fait affaire à plusieurs reprises avec le conseil de bande, notamment en offrant ses services de traiteur ou en réalisant des gâteaux pour les anniversaires des Peacekeepers. Mme Brunet était à la fois fâchée et triste que les élus de la communauté autochtone agissent de la sorte. «Ça me fait peur  parce qu’on essaie toujours de s’éloigner des dossiers politiques, commente-t-elle. En tant que commerce je ne peux pas avoir une opinion ou prendre position sur un sujet politique parce qu’on peut se mettre des clients à dos. Ça peut être fatal.» Elle estime que 20 à 25 % de sa clientèle provient de la communauté autochtone voisine. Elle se désole que les commerçants soient ciblés, car contrairement au milieu politique, les relations d’affaires entre Châteauguay et Kahnawake vont bien. «On travaille fort pour bâtir de belles relations», souligne-t-elle.

Nuire à l’économie châteauguoise

La lettre stipule que le conseil de bande cesse l’achat des produits et de services provenant de Châteauguay en raison d’une poursuite judiciaire instiguée par quatre villes de la MRC de Roussillon, un litige concernant des terres près de l’autoroute 30. Le conseil de bande exige des commerçants qu’ils mettent de la pression sur la Ville de Châteauguay afin qu’elle abandonne sa poursuite. «Nous sommes conscients que la communauté d’affaires de Châteauguay peut se demander pourquoi on cible les commerces, peut-on lire dans la lettre. Nous espérons que vous comprenez que cette poursuite a un impact négatif direct sur l’économie de Kahnawake, alors nous n’avons pas le choix de créer un impact sur l’économie de Châteauguay.»

Des mohawks appuient les commerçants châteauguois

Lorsque Mme Brunet a partagé sur son compte Facebook la lettre qu’elle a reçue, de nombreux clients de Kahnawake lui ont mentionné être contre cette idée de M. Norton. «Des gens m’ont dit : ‘’il n’y a personne qui me dira où dépenser mon argent’’. Plusieurs sont contre cette idée-là même s’ils appuient la bataille au sujet des terres», souligne la pâtissière.

Bob Scrimegeour, propriétaire de l’entreprise Bob’s Radiator, à Châteauguay, entend le même discours chez ses nombreux amis et clients de Kahnawake. En affaires depuis 43 ans, il a toujours eu une bonne clientèle dans la réserve autochtone. Le conseil de bande était d’ailleurs un de ses bons clients. «Pour l’instant ça ne change rien pour moi. Les gens me disent qu’ils continueront à venir me voir parce qu’ils trouvent que je fais une bonne job», commente-t-il. Selon lui ce n’est pas aux compagnies de Châteauguay de régler ce problème politique.  «C’est aux maires, aux gouvernements et à Joe (Norton) de se parler», poursuit-il.

Mme Brunet, de son côté, craint que ce conflit s’envenime et que les mesures prises par le conseil de bande s’aggravent. «Est-ce que ça ira jusqu’à bloquer le pont?» s’inquiète-t-elle.