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Les défis d'hiver d'un facteur
le samedi 27 janvier 2018
Modifié à 5 h 57 min le 27 janvier 2018
Froids extrêmes, tempêtes de neige, les facteurs affrontent des conditions difficiles cet hiver. Mais pour l’un d’eux, il y a bien pire que le froid mordant.
«Les chiens sont notre cauchemar. En 18 ans de carrière à Châteauguay, j’ai été mordu sept fois et j’ai été attaqué une cinquantaine de fois», dit François Bernier, marchant entre deux maisons de la rue Richelieu à Châteauguay. L’homme a accepté que le journal Le Soleil de Châteauguay fasse un bout de chemin avec lui le 18 janvier. Il note au passage : «Il y a beaucoup de débats sur les pitbulls, bien sur les sept chiens qui m’ont mordu, il n’y a pas un pitbull. C’est des bergers allemands, des petits schnauzers, caniches, labradors.»
Les sept fois que je me suis fait mordre, les clients m’ont dit : je ne comprends pas, c’est la première fois qu’il fait ça.Bien habillé Comme il a une route «hybride», François Bernier alterne entre la marche et les déplacements en camionnette, le froid polaire l’affecte peut-être moins que d’autres, nuance-t-il. «Postes Canada nous habille, la tenue vestimentaire est vraiment bonne pour le froid l’hiver. Il y a seulement nos bottes et nos gants qu’on achète nous-mêmes», fait part le facteur. Ses collègues sans véhicule disposent de coupons leur permettant de payer un taxi pour s’y réchauffer au besoin, précise-t-il. L’hiver en cours n’était pas le plus terrible qu’il ait connu au moment de l’entrevue. «Le verglas c’est pire. La pire température, c’est quand il fait moins un et qu’il pleut. On est trempé, c’est difficile de se réchauffer», témoigne-t-il. Quelques jours plus tard, le «pire s’est produit». Un redoux et du verglas ont glacé le décor. «J’ai un colis à livrer à cette adresse. La dame est gentille. Elle me dit bonjour», note François Bernier. Un souvenir lui revient : un homme a déjà engueulé le facteur pour lui avoir souhaité une bonne journée. «Ce n’est pas toujours facile travailler avec le public, convient-il. Mais la majorité des gens sont gentils.» Neige et glace Les routes enneigées ou glacées constituent un défi pour les facteurs. «Peu importe le maire, à Châteauguay c’est problématique. On s’en parle entre facteurs et ailleurs on voit la différence. Le déneigement est plus rapide. Mais c’est peut-être un peu mieux cette année», indique M. Bernier. Concernant les citoyens, s’il estime qu’une propriété représente un risque et comporte des éléments non conformes à la règlementation, un facteur peut y cesser la livraison du courrier. Si un client n’a toujours pas déneigé trois jours après une tempête, son courrier peut-être placé en retenue. «C’est sûr qu’on laisse des chances. On y va selon le client. Si ce n’est pas une personne problématique, on ne fait pas du trouble pour rien non plus. On donne des avertissements. On essaie de parler, la communication en premier», expose François Bernier. Il fait valoir que les accès aux boîtes aux lettres bien nettoyés facilitent leur tâche. «L’été, on marche entre 12 et 15 km dans une journée. L’hiver entre 14 et 18 km. Imaginez-vous, vous marchez pendant 18 km et ce n’est pas déneigé. Les mollets à la fin de la journée, c’est dur. Les cours des clients, c’est notre milieu de travail. Quand c’est plat, ça va bien. Les escaliers, c’est vraiment ça qu’il est important de déneiger. Quand ils sont enneigés, on ne voit plus les marches. C’est un danger de blessures», insiste le facteur. Il souligne que son milieu de travail change continuellement. «Il faut s’adapter à chaque jour. Il faut constamment être vigilant. C’est ça qui est le challenge de notre métier», dit-il. Accidents en baisse Les chutes et les glissades représentaient 49 % des accidents entrainant une perte de temps pour les facteurs en 2016. Ces accidents sont néanmoins en baisse de 40 % depuis 2011 grâce à ses efforts de sensibilisation à la sécurité, fait valoir Postes Canada. Le nombre de blessures a baissé graduellement de 2888 en 2011 à 1658 en 2016. Dans le même intervalle, le taux de blessure par 100 employés permanents a reculé de 6,2 à 3,8. [caption id="attachment_37340" align="alignleft" width="521"] François Bernier effectue une partie des livraisons en camionnette. (Photo Michel Thibault)[/caption] Anecdotes canines Lucky punch Un petit chien s’est précipité sur François Bernier un jour d’été. «Il s’en vient et il veut me mordre le mollet. Je fais juste ça comme ça pour dire va-t-en», relate le facteur en lançant doucement un pied en avant. «Le lucky punch sur le bout du nez. Le chien tombe, les pattes raides. Pauvre chien. La madame sort dehors : t’as essayé de tuer mon chien ! T’es un malade !» se souvient-il. Répulsif dans le chapeau Ce jour-là, François Bernier portait un manteau à capuchon bordé de fourrure. Il livrait du courrier à pied. «Un berger allemand s’est rué vers moi. J’ai sorti ma bouteille de répulsif et j’en ai vaporisé un peu devant. Le vent l’a poussé dans les poils de mon capuchon. Je ne voyais plus rien. Je ne savais plus où était le chien. J’ai réussi à téléphoner à un taxi parce que je me rappelais où était le numéro sur mon cellulaire», raconte-t-il. Le chien ne l’a finalement pas attaqué. Peureux Un chien au bout d’une longue laisse gardait le terrain où François Bernier avait du courrier à livrer. «J’approche le courrier de sa bouche. Il saute et il essaie de le mordre. Je me dis wow et je suis pour m’en aller», fait-il part. Le maître sort et traite le facteur de peureux. Pour lui faire entendre raison, M. Bernier lui dit : «Monsieur, je vais vous montrer quelque chose. Je présente le courrier au chien, il saute dessus et il en déchire un bout. J’ai dit au monsieur : ça, ça pourrait être ma jambe. Ça ne me tente pas que ce soit ma jambe. C’est ça, t’es juste un peureux, t’as peur de mon chien, qu’il m’a répondu». Le facteur a continué sa route en invitant l’homme à contacter son superviseur. 800 à 900 attaques Chaque année, les facteurs sont victimes de 500 à 600 attaques de chiens, selon Postes Canada. [caption id="attachment_37341" align="alignleft" width="521"] François Bernier a accepté d'accorder une entrevue au Soleil de Châteauguay. (Photo Michel Thibault)[/caption]