Châteauguay : les cols bleus et la Ville ont nui aux opérations de déneigement
Le Tribunal administratif du travail a ordonné le 10 février aux cols bleus de Châteauguay de cesser de refuser « de façon concertée» d’effectuer des heures supplémentaires requises dans le cadre des opérations de déneigement. Quant à la Ville, elle doit désormais «prendre toutes les mesures pour s’abstenir» d’annuler les opérations de déneigement de nuit si elle dispose d’au moins une équipe complète.
La juge Anick Chainey devait se pencher sur le conflit qui oppose la Ville de Châteauguay et ses cols bleus et qui a mené à d’importants retards dans les opérations de déneigement récemment, au grand dam des citoyens.
La Ville attribuait ce retard au refus de ses employés syndiqués d’effectuer des heures supplémentaires de nuit depuis qu’elle a eu recours à des entrepreneurs privés pour aider les cols bleus, comme le prévoit la convention collective. Les cols bleus niaient ces actions concertées et affirmaient plutôt que le retard était causé par l’annulation d’opération de déneigement par l’employeur.
Une réaction au recours au privé
La juge relate qu’à Châteauguay, «les cols bleus de la Ville s’occupent exclusivement du déneigement sur son territoire et qu’il s’agit de l’une des rares municipalités au Québec où il en est ainsi. Il en résulte pour ces derniers une certaine fierté qu’ils associent notamment à la qualité de la prestation de travail offerte».
Le choix de la Ville de solliciter le privé pour donner un coup de pouce à ses employés «a provoqué l’émoi», selon le syndicat. Le 31 janvier, des cols bleus ayant accepté de faire des heures supplémentaires de nuit se sont décommandés après avoir été informés de la décision de la Ville d’ajouter des camions externes pour augmenter la cadence du ramassage de la neige.
Un des enjeux, ces dernières semaines, était de confirmer la présence d’un souffleur par équipe pour opérer la machinerie. Sans souffleur, l’opération de déneigement ne pouvait pas avoir lieu. C’est arrivé à au moins trois reprises. La juge a conclu qu’il s’agissait d’une action concertée de la part des cols bleus.
Quant aux allégations de vandalisme sur de l’équipement et d’intimidation auxquelles la Ville a fait référence dans les médias, le Tribunal conclut qu’il n’y a pas de preuve que les gestes aient été posés par les cols bleus.
Des annulations non justifiées
Dans son jugement, Anick Chainey reproche aussi à la Ville d’avoir choisi d’annuler des opérations bien qu’elle avait à sa disposition une équipe complète de cols bleus prêts à travailler et à faire des heures supplémentaires de nuit.
«Il est à cet égard assez paradoxal de venir prétendre devant le Tribunal et devant les médias que la situation est telle qu’elle prive non seulement les citoyens de Châteauguay du service auquel ils ont droit, mais qu’elle comporte également des risques pour la santé ou la sécurité de ces derniers, et ce, tout en préférant l’alternative d’annuler tout au lieu de faire ce qui lui est possible dans les circonstances pour offrir le service en question», écrit-elle. Le chef aux opérations à la direction des travaux publics justifiait ces annulations en mentionnant qu’il voulait deux équipes et non une seule.
Les deux parties doivent respecter les ordonnances du Tribunal jusqu’à que les employés syndiqués aient le droit de faire la grève, soit après l’échéance de la convention collective le 31 décembre 2023.
Des tensions au conseil municipal
Le maire de Châteauguay Eric Allard n’a pas fait état du jugement du Tribunal administratif du travail à la séance du conseil municipal du 13 février, mais il a commencé l’assemblée par un long résumé sur ce qui s’est passé dans les dernières semaines en précisant d’emblée que ce n’était pas l’endroit pour discuter de relations de travail.
À la période de questions, un citoyen de Châteauguay également col bleu a souhaité laissé son temps de parole au président du SCFP-Québec, Patrick Gloutney. Ce dernier a dit vouloir «tendre la main (à la Ville) pour que ce dossier-là cesse». «Vous êtes cette même personne qui est venue ici en juillet et qui nous a menacés de nous faire une fête de notre 350e et de venir bousiller tout ça ?» a questionné le maire, avant de refuser de lui donner le droit de parole.