Aide sociale : être pénalisé financièrement par amour
Une personne qui reçoit de l’aide sociale et qui cohabite avec un amoureux est automatiquement pénalisée financièrement, déplore le Réseau d’information et d’aide aux personnes assistées sociales. L’organisme a profité de la Saint-Valentin pour dénoncer cette perte de revenus décriée depuis des années qui est encore plus d’actualité aujourd’hui dans le contexte de la crise du logement, selon la directrice Linda Gervais.
Le problème, selon elle, c’est qu’au bout d’un an de cohabitation, si deux personnes qui reçoivent de l’aide sociale sont reconnues comme un couple, elles recevront une prestation de couple plutôt que deux prestations individuelles. Selon l’organisme de Châteauguay, avant d’être considérées comme un couple, chacune des personnes recevait une prestation de 807 $ par mois, pour un total 1 614 $ pour les deux. Or, la prestation de couple est plutôt de 1 224 $, ce qui représente une coupure de 390 $ par mois.
Les couples formés d’une personne qui reçoit de l’aide sociale et d’une autre qui travaille à temps plein sont aussi désavantagés puisque la prestation d’aide sociale de la personne sera éventuellement coupée. «Une personne qui travaille au salaire minimum et qui n’arrive même pas à subvenir à ses propres besoins devient alors responsable de son conjoint après un an de cohabitation», explique Mme Gervais.
Les femmes victimes de violence conjugale
L’organisme La Re-Source qui vient en aide aux femmes victimes de violence conjugale, était présent aux côtés du RIAPAS pour dénoncer les iniquités de l’aide sociale. Des femmes qui vivent dans un contexte de violence conjugale se retrouvent dans un cercle vicieux puisqu’elles n’ont pas accès à l’aide sociale tant qu’elles n’ont pas quitté le milieu familial, sinon l’aide sociale considère le revenu du couple et le couple doit signer la demande.
«Si je n’ai pas de revenu, je ne peux pas me louer un logement. Si je n’ai pas de logement, je ne peux pas recevoir d’aide sociale, donc qu’est-ce que je fais?» illustre Claudia Lavigueur, intervenante à la Re-Source. Les femmes hébergées à la maison de la Re-Source peuvent faire une demande, mais les places demeurent limitées. «Beaucoup de femmes vont rester dans le milieu de violence plutôt que d’aller dans la rue, parce que c’est leur seule option», souligne Mme Lavigueur.
Une personne, un chèque
Les organismes qui soutiennent les personnes vivant de l’aide sociale martèlent depuis des années le slogan : une personne = un chèque.
Pour Mme Gervais, c’est d’autant plus important maintenant, qu’on soit en couple ou non. «En pleine crise du logement, alors que les loyers disponibles sont totalement inabordables pour les personnes en situation de pauvreté, pénaliser l’entraide est absolument inacceptable», dit-elle. Des personnes assistées sociales qui ne forment pas un couple, mais qui habitent sous le même toit sont à risque d’être perçues au sens de la loi comme un couple.
«J’ai des jeunes qui étaient colocs dans une chambre avec un lit double. Ce n’est pas un couple, mais ils n’ont pas le choix. Tant qu’à dormir dans la rue avec des étrangers qui se promènent un peu partout, c’est pas si mal de dormir dans un lit avec un étranger», raconte-t-elle.